
Skiá, chaos.
Installation vidéo et sonore, papier calque, fil de pêche et miroir, Bouillons Kub, Orval, 2025
A propos de Skiá, chaos.
Il faut rester. Rester vingt minutes. Concentré vingt minutes sur autre chose qu’un écran. Devant « Skia chaos » d’Edith Gallo. Elle rêve le chaos et comme pour tout rêve, une fois éveillé, elle n’en discerne bien que les contours. Car c’est du papier calque dressé en mur jusqu’aux confins du plafond, car c’est un film vidéo qui est projeté sur ce calque froissé, dérangé, car dès lors Edith ne peut plus savoir sous quelles figures va se présenter le chaos qui sortira de ses mains vingt minutes durant.
Pourtant on se dit : si c’est ça le chaos, ces traînées de lumière, ces flashes de couleurs qui se boivent l’une l’autre, ces abondances de jets incertains, et puis, et puis, comme l’arrivée devant la mer au soleil couchant, ces nébuleuses de points blancs qui scintillent avant de se perdre dans l’infini. Si c’est ça le chaos et Skia par-dessus, oui, ça valait la peine de venir. Ici au Kub ? Sur Terre ? Comme on veut. Mais de rester immobile, muet, requis. Ça oui, parce que ça pourrait bien être comme ça, l’Origine.
Louis Marie Catta
La plongée à l’intérieur du Kub vous transporte, tel que l’a installé Edith Gallot, telle une moderne Circée, dans l’univers platonicien du mythe de la caverne, où l’apparence de l’inconnu, au gré de l’artiste, se fragmente et se reconstruit. Du bouillonnement quantique des origines, aux jeux galactiques des couleurs, la mouvance des images indéfinies vous happe vers des espaces lointains, aux confins des limites imaginaires du vivant. L’ombre d’un squelette figé fixe des limites aux variations polychromes de ce petit univers suspendu qui semble se prolonger vers un l’infini qu’on devine derrière le calque révélateur. Sont-ce des étoiles qui scintillent et se meuvent, ou des cascades proto-cellulaires, des errements ioniques ou des êtres déformés par nos sens limités ? Heureusement, loin des fracas des étoiles qui s’entrechoquent, c’est une musique apaisante, rassurante, intime, qui berce nos impressions, comme une lointaine prière taoïste appelant au « non agir ». Un moment d’un autre monde…selon Edith Gallot.